Sting, un Englishman bien sage au Paléo...
Le chanteur et bassiste anglais a offert mercredi soir au festival nyonnais un concert poli et trop mou pour l’immensité de la Grande Scène
Une quinzaine de minutes avant le début de son concert, une pluie bienvenue s’invite sur la plaine de l’Asse. Mais au lieu de l’orage potentiellement attendu, ce ne sera qu’une petite bruine à peine rafraîchissante et vite dissipée. Lorsque Sting s’avance poliment sur la Grande Scène du Paléo Festival et démarre son set avec Message in a Bottle, extrait du deuxième des cinq albums qu’il a publiés avec The Police entre 1978 et 1983, l’air est sec. Le musicien britannique enchaîne sur Englishman in New York (son tube solo de la fin des années 1980), Every Little Thing She Does Is Magic (The Police, 1981) et If You Love Somebody Set Them Free (le premier single de son premier album solo, The Dream of the Blue Turtles, 1985).
Si cette entame est parfaite dans le choix des morceaux, on est malheureusement rapidement confronté à ce paradoxe qu’ont bien souvent les concerts de Sting. Malgré ce qu’il représente dans l’histoire de la musique, malgré la qualité de son écriture, c’est un ennui poli qui s’impose vite. T-shirt rayé rouge et bleu, pantalon noir moulant et bottes, Gordon Matthew Thomas Sumner, 70 ans, est toujours d’une classe qui en impose, solidement agrippé à sa basse Fender qui, elle, semble accuser le poids de l’âge. Entouré de cinq musiciens et deux choristes, il fait le job, mais guère plus. Issus de The Bridge, son dispensable dernier album sorti l’an dernier, If It’s Love et Rushing Water ne convainquent guère et introduisent un long ventre mou.
Les titres s’enchaînent, Sting et ses musiciens les étirent à l’envi, ralentissent le tempo là où les concerts en festivals open air exigent quelque chose de plus soutenu. Alors qu’une relecture de Wrapped Around Your Finger laisse perplexe, une version mollassonne de Roxanne provoquera en rappel la même impression de gâchis. Il a beau tenter de faire chanter le public, Sting n’est pas fait pour les foules de plusieurs dizaines de milliers de personnes. Il y a trois ans, l’intimité de l’Auditorium Stavinski, dans le cadre du Montreux Jazz, lui avait mieux convenu. On rêverait de le voir un jour dans un club de jazz.
Même si So Lonely verra plus tard le public se réveiller quelque peu, la propension qu’a le natif de à Wallsend de préférer la nonchalance reggae à la hargne rock laisse perplexe. A ses côtés, les guitaristes Dominic et Rufus Miller, un père et son fils, restent eux aussi un peu trop polis, tandis que le jeune batteur Zach Jones est bien trop appliqué, martèle le rythme plus qu’il ne l’épouse. Alors que le concert s’achève sur une version intimiste de Fragile, on a l’impression de l’avoir déjà oublié.
(c) Le Temps by Stéphane Gobbo