Sting de Noël à la Salle Pleyel...
A-t-on besoin de présenter Sting? On peut tenter de résumer la carrière de l'ex-chanteur/bassiste de The Police, mais ce qu'il restera c'est tous ces morceaux inoubliables, que ce soit dans le cadre du groupe ou en carrière solo. Il a collaboré avec les plus grands comme Clapton, comme avec les plus inattendus, Cheb Mami ou Craig David. Il vient de sortir un tout nouvel album 'If On a Winter's Night' qu'il nous présentait ce soir à la salle Pleyel.
Pour nous présenter son conte de Noël, Sting s'est déplacé avec un orchestre presque au complet – il manquait les bois mais les cordes étaient plus que représentés. Il commence par nous expliquer – en Français please! – en quoi l'hiver est magique, avant de nous guider de par sa féérie allégorique de la saison blanche.
Il a vraiment l'allure d'un conteur assit droit sur sa chaise haute, tournant les pages de son grand livre, habillé comme dans un film basé sur un roman de Jane Austen. Si pour son dernier album, il avait choisi un tournant classique, nous sommes désormais de plein pied dans le folklore anglais et celtique.
Les thèmes sont proches de Noël tinté de biblique, avec 'Gabriel's Message', où les trois choristes prennent des airs de Rois Mages. Mais nous dérivons aussi avec 'Soul Cake', plus traditionnellement chanté aux alentours de la Toussaint*. Sur scène, une grande rousse échange sa cornemuse à soufflets contre un violon pour rentrer dans une gigue endiablée avec son partenaire.
Malgré la harpe, la trompette, l'ensemble des cordes et de cuivres et le déploiement de percussions, je n'arrive pas à m'emmitoufler dans ses compositions. Certes, le thème est l'Hiver, mais est-ce une raison pour que la prestation soit aussi froide?
Si 'Christmas at Sea', basé sur un poème de Robert L. Stevenson, m'intrigue, j'attends que le concert s'embrase. 'The Burning Babe' enfin nous rapproche de la voix plus suave de Sting, mais sur 'Ghost Story', malgré le thème, plus personnel (son père), nous revenons à une performance musicale professionnelle.
Il nous propose ensuite trois chansons provenant de sa ville natale, du côté de Newcastle. Sur 'Team Spirit', sa voix réchauffe enfin l'atmosphère et me rappelle 'It's Probably Me', mais le voilà qui ruine le tableau en chantant le cri du loup solitaire dans la steppe. Après une chanson, religieuse à nouveau, a cappella et donc un peu traitre, il nous propose quatre berceuses. Comme si le tempo était endiablé jusque là…
'Lullaby for an Anxious Child', qui clôt le set, me rappelle 'Shape of my Heart'. Après avoir présenté ses musiciens, il quitte la scène. Il revient pour un chant de Noël, 'I Saw Three Ships', puis repart. Il revient à nouveau pour 'You Only Cross My Mind in Winter' et repart. La salle l'acclame, il revient saluer, et repart. Les aller-retours de la diva commencent à me fatiguer, mais le public insiste, tonitruant.
Il revient pour une dernière chanson, alors que les lumières s'étaient rallumées et que la moitié du public s'était rhabillé. Alors que je m'attends à une gourmandise telle que 'Fields of Gold' ou 'Seven Days' revisité avec orchestre, il se contente de rejouer 'Soul Cake'.
Est-ce trop demander que de vivre une chanson qui nous aura bercé tant de fois, ne serait-ce que pour nous remercier de suivre la carrière de l'artiste depuis plus de trente ans?
*Sting a pris le temps de nous raconter, alors pourquoi pas moi? Il s'agit de gâteaux que l'on offrait aux affamés afin qu'ils prient pour les âmes des défunts.
(c) Soul Kitchen by ZiKomAgnes
Comment j'ai fêté Noël en avance avec Sting...
C’est donc avec un enthousiasme non dissimulé que je me suis rendu, à l’invitation de la maison de disques, à l’unique concert français de la tournée 'If on a Winter’s Night'. Pour ceux à qui Sting n’inspire que Roxanne (heu ça c’était Police), Englishman in New York, Fields of Gold ou encore Desert Rose, il faut dire que cet album dévoile un pan totalement différent de l’univers musical de l’artiste. Après Sacred Love en 2003, un album mal accueilli du fait de relents plus ou moins douteux de R&B, le chanteur a pris des chemins de traverse, peut-être moins commerciaux mais beaucoup plus riches du point de vue musical. C’est ainsi que sont nés les albums 'Songs from the Labyrinth', fait de musique classique, et le tout juste sorti 'If on a Winter’s Night'.
Et me voici donc, mardi soir, assis dans la Salle Pleyel pour découvrir ce nouvel opus fait de chansons folkloriques et d’airs composés pour célébrer l’hiver. Malgré les défaillances du RER A, il n’y a plus un siège de libre. Sur scène, là où j’attendais une formation classique intimiste, c’est tout un orchestre qui prend place. Pas moins de 30 excellents musiciens, des cordes, des cuivres, des percussions, il y a tout ce que l’on peut attendre en passant par quelques curiosités comme une cornemuse, un accordéon ou encore une harpe métallique. Les choristes ne sont pas en reste, chacune d’entre elles a de quoi se produire seule, notamment une diva black grave et jazzy et une lumineuse blonde à la voix cristalline qui ont sublimé certains airs de leur participation. Et puis il y a Sting, pas comme on l’imagine mais fidèle à la légende. Habillé d’un costume 3 pièce et paré une barbe à l’ancienne, s’il n’avait pas l’élégance britannique qu’on lui connait, on pourrait le croire tout droit issu d’un film sur la guerre de Sécession. La classe.
Après une courte introduction en Français ''Nous sommes là ce soir pour célébrer l’hiver, le temps du repos, des fantômes, des pactes avec les morts, avant que ne reprenne le cycle des saisons…'', la magie arrive. Elle est faite d’une succession d’airs mélancoliques et de comptines plus festives (à noter la salle debout après la remarquable envolée des solistes violon sur 'The Burning Babe'). De manière remarquable, Sting réussit à embarquer tout le monde dans son nouvel univers. De temps en temps, on retrouve d’anciens classiques ('Hounds of Winter' et I should have loved you) réarrangés, ceux qui étaient venus pour cela soufflent. Bien que les morceaux faits de sa seule voix et d’une guitare suffisent à faire de ce concert un régal, les morceaux joués avec tout l’orchestre sont plus que réjouissants. La comptine 'Soul Cake' fera chanter la salle qui ne connaissait pas les paroles quelques secondes plus tôt.
Au final : une grande soirée, 5 rappels, une salle debout à chaque fois et qui continue à applaudir bien après le retour des lumières et l’arrivée des roadies.
Des concerts, j’en ai vu plein, j’en ai même produit. Des comme celui-ci, il y en a très peu. Le plus ressemblant dans l’ambition et le nombre de musiciens était probablement 'A Hot Night in Paris', concert de Phil Collins et de son Big Band au Grand Rex. Depuis, j’attendais certainement… celui-ci !
Que dire à part que ce concert fait partie des instants rares et fugaces qu’aucun disque ne peut capturer intégralement?
Que si jamais vous voulez éviter les sempiternels disques de Noel faits de standards éculés, la magie de cet album vous touchera certainement, que c’est du bouillon de poule pour l’âme et qu’en prenant le temps de vous y plonger, vous vous ferez du bien...
(c) Le Post by William Rejault